Denis Côté, Les Géants de Blizzard (SF)
Denis Côté
Les Géants de Blizzard
Montréal, La Courte Échelle, 1985, 96 p. (illustrations de Serge Chapleau).
Après avoir écrit pour les adolescents (avec succès), Denis Côté s’adresse maintenant à un public plus jeune avec Les Géants de Blizzard. Avec ce roman illustré par Serge Chapleau, la Courte Échelle diversifie sa production et vise un nouveau marché. Il s’agit d’un space opéra dont la trame narrative n’est pas très originale. Toutefois, Denis Côté fait preuve d’un peu plus d’imagination dans les détails, ce qui contribue à faire du livre une oeuvre attachante et sympathique qui devrait plaire à ceux à qui il s’adresse.
Les Géants de Blizzard met en scène des héros positifs qui ont pour nom Braal, Chrysalide et Elée. Tous trois font partie d’une organisation secrète qui a pour objectif de préserver la paix dans la galaxie, une sorte de Greenpeace du futur. Les deux empires qui se partagent la galaxie, le Pacte et la Ghoûl, ne se font pas la guerre comme tel mais ils visent à agrandir leur territoire respectif au détriment de l’autre. L’enjeu de chacune des parties d’échecs qu’ils se livrent est une planète conquise.
L’organisation secrète craint que l’équilibre entre les deux empires soit rompu à court terme, d’autant plus que le Pacte procède à l’installation d’un nouvel armement sur une planète lointaine, Blizzard. Les trois héros sont désignés pour saboter cette installation et pour alerter du même coup l’opinion publique. Afin d’éviter les patrouilles du Pacte, le trio doit traverser une zone inconnue qui leur réservera plusieurs surprises. Arrivé sur la planète enneigée, le trio ne sera pas au bout de ses peines et découvrira que, contrairement à ce qu’on croyait, elle n’est pas inhabitée.
Le récit s’en tient à une progression linéaire, très méthodique, et ne s’engage dans aucune intrigue secondaire. L’auteur évite les longues descriptions, utilisant plutôt les dialogues pour transmettre les informations indispensables. Le rythme s’en trouve accéléré et soutenu. Le tempo chute quelque peu toutefois au moment de la progression du groupe vers la base militaire, mais l’épisode final relance le récit.
Les péripéties entourant la traversée de la zone inexplorée sont intéressantes, particulièrement la dernière. Il est dommage qu’elle donne lieu à une invraisemblance. S’il est vrai que le vaisseau Taureau et les passagers ont pris la consistance et l’apparence du verre, comment se fait-il que le son aigu émis par l’ordinateur fasse éclater les cristaux qui bloquent la route du vaisseau mais non le vaisseau lui-même ? D’autant plus que dans cette région, le son se propage dans l’espace.
La principale trouvaille de l’auteur concerne la nature des habitants de Blizzard. C’est imaginatif et Denis Côté en profite pour livrer sans détour son message en faveur de la paix. Le témoignage des habitants de Blizzard prend alors une valeur exemplaire. « Chacun d’entre nous ne vivait à peu près que pour lui-même. Nous étions malheureux, nous connaissions la haine et la guerre. Nous avons même failli nous détruire les uns les autres. Alors, devant ce risque de disparition complète, il nous a fallu changer notre façon d’être. Aujourd’hui, nous ne sommes plus seuls. Nous vivons ensemble. »
Le message et l’imaginaire ne sont pas parfaitement intégrés dans le roman de Côté. On dirait qu’il y a un temps (au début et à la fin du récit) pour moraliser – je n’irais pas jusqu’à dire pontifier –, et un temps pour s’amuser, s’évader dans un autre univers. Heureusement qu’à travers le roman, une préoccupation demeure constante : un respect immense pour la vie sous toutes ses formes qui frôle parfois la naïveté chez Chrysalide. Cet être bissexué qui perçoit les sentiments d’autrui avec une acuité douloureuse apparaît comme un idéal à atteindre.
Comme on peut le constater, Les Géants de Blizzard vise à éveiller la conscience du jeune lecteur, se démarquant d’un courant qui ne cherche qu’à stimuler son imagination.
Claude JANELLE