Joceline Sanschagrin, La Fille aux cheveux rouges (Fa)
Joceline Sanschagrin
La Fille aux cheveux rouges
Montréal, La Courte Échelle (Roman Jeunesse, 20), 1989, 91 p.
Ayant franchi le mur géant du roman Atterrissage forcé, la jeune Wondeur (qui a déjà eu des « pouvoirs ») cherche son père dans des souterrains inondés. Le crabe, gardien d’une caverne brumeuse, a appris en rêve l’identité et la quête de Wondeur. La fillette rencontre Moussa, un jeune fugitif ; avec lui, elle s’engage dans le troisième des canaux que garde le crabe. Elle y trouvera la confirmation qu’elle est sur la bonne piste.
Moussa et Wondeur sont arrêtés par des adultes sévères qui les forcent à porter des oeillères. Ils trouvent la lumière du soleil mais dans une ville dépotoir où les gens « se mêlent de leurs affaires. » Une vieille femme, qui soigne les arbres chétifs, les mène à un karatéka vivant retranché dans un phare. Ni lui ni la vieille ne peuvent aider Wondeur à trouver son père. La fillette et Moussa choisiront de consacrer leur énergie à la protection des arbres de la ville.
Le premier roman de la série évoquait la quête d’une enfant adoptée pour trouver ses parents biologiques. Dans le second, on rencontre un garçon qui a transité de famille d’accueil en famille d’accueil. Antimilitarisme, anticonformisme, écologisme, recyclage, allusions à l’alcoolisme, il y a quelquefois de la subtilité et parfois non, dans le symbolisme de Joceline Sanschagrin. Le courant de réalisme social qui domine le livre québécois pour la jeunesse est ici bien sensible derrière la mince cloison de l’imaginaire.
Cet imaginaire, je suis tenté de le rapprocher plus du réalisme magique que de la SF ; La Fille aux cheveux rouges est moins proche de la SF que l’était Atterrissage forcé. Il n’y a en somme que le crabe qui parle, et la dystopie urbaine, pour distinguer La Fille aux cheveux rouges d’un roman de littérature générale – un bon roman pour jeunes, par ailleurs.
Déplorons toutefois la curieuse pratique de présenter les pensées de Wondeur comme des répliques de dialogues, avec un tiret ; cela porte à confusion. Quant au style de Pierre Pratt, qui a signé les illustrations, il évolue vers quelque chose d’agréable à voir.
Alain LORTIE