Yvon Brochu, On n’est pas des monstres (Fa)
Yvon Brochu
On n’est pas des monstres
Montréal, Québec/Amérique (Littérature Jeunesse #39), 1992, 181 p.
Jacques Saint-Martin, journaliste dans le secteur culturel, se plonge dans une enquête au sujet de la sculpteuse Anne-Marie Zerkovitch. Cette artiste de talent vit isolée depuis cinq ans sur une propriété dont elle ne sort jamais. Après avoir amadoué le chien de garde, Saint-Martin s’introduit dans la résidence pour identifier les mystérieux personnages qui vivent avec la sculpteuse et qui semblent la garder en otage. Mais la visite du journaliste ne reste pas longtemps secrète et c’est très ouvertement que l’incroyable vérité se manifestera à lui : les trois singuliers compagnons d’Anne-Marie ne sont pas des monstres, mais ce ne sont pas des humains non plus : il s’agit de sculptures, littéralement douées de vie par le talent exceptionnel de leur créatrice.
Comme les personnages de bande dessinée qui prenaient vie dans On ne se laisse plus faire du même auteur, les êtres de pierre du présent roman offrent une métaphore de l’œuvre de l’artiste (ou du créateur au sens large), acquérant une vie propre dès qu’elle n’est plus entre les mains de l’auteur – ou même pendant qu’elle est encore sous sa plume (ou son pinceau). Métaphore, aussi, de la servitude du créateur qui se trouve parfois plus lié à son œuvre qu’il ne voudrait, incapable quelquefois de lui échapper, de la laisser derrière lui et de passer à autre chose.
En somme, un roman conséquent, un roman qui a un propos – ce qui hélas n’est pas toujours le cas en littérature de jeunesse.
Alain LORTIE