Francine Pelletier, La Planète du mensonge (SF)
Francine Pelletier
La Planète du mensonge
Montréal, Paulines (Jeunesse-Pop #89), 1993, 154 p.
L’année passée, à la fin de La Saison de l’exil, Francine Pelletier nous avait laissés sur un de ces paragraphes dont elle a le génie et qui suggèrent une suite : « Arialde prit une décision, calme, tranquille. Elle ne le laisserait pas repartir sans elle. Où qu’il allât, elle irait avec lui. Elle ne savait pas encore comment, mais elle se débrouillerait. Par tous les moyens. » Et c’est effectivement ce que la jeune femme réussit à faire entre les deux romans, au grand dam de Jérémie, d’ailleurs. Il l’aime, mais il aurait voulu qu’elle ne le suive pas sur Cristòbal-Colòn – cette planète dont on apprend la découverte dans La Saison de l’exil. Et dès le premier chapitre on comprend pourquoi : un incendie s’est déclaré dans le vaisseau Caravelle, œuvre d’un pyromane. Et c’est pour arrêter cette personne que Jérémie va sur Cristòbal-Colòn.
Il s’agit d’une mission dangereuse, comme le démontre rapidement l’incendie d’un des laboratoires de la nouvelle colonie. Et Jérémie passe tout près d’en être la victime… Mais pour une fois, c’est Arialde qui lui sauve la vie. Hospitalisé, Jérémie se trouve dans l’impossibilité de mener son enquête. Problème rapidement résolu, puisque le supérieur de Jérémie décide de charger Arialde de la mission, pour remplacer son ami ! C’est l’occasion pour la jeune femme d’apprendre enfin le rôle véritable de Jérémie (je m’en voudrais de trahir un mystère qui s’étale sur trois romans !) et de se replonger à la fois dans les aventures et dans la forêt, ce qu’elle n’avait pas fait depuis son exil d’Arkadie. Car un satellite d’observation a transmis aux colons l’image d’un groupe campant près d’une rivière. Une espèce intelligente sur Cristòbal-Colòn ? C’est ce qu’une équipe, dont Arialde fait partie, est chargée d’aller vérifier.
Une planète vierge, un pyromane, des extraterrestres… Ça en fait de la matière pour un roman d’à peine 154 pages ! Et à mesure que la fin approche, sans que la solution se laisse entrevoir, on se demande si on ne va pas découvrir un « à suivre » à la dernière page…
Mais pas du tout. De grandes surprises attendent le lecteur : le talent de conteuse de Francine Pelletier se révèle à nouveau et bien malin celui qui devinera la fin avant les derniers chapitres, mais tous les mystères sont résolus, en quelque sorte, quand arrive la dernière ligne du roman. « En quelque sorte », oui, car ce serait bien mal connaître l’auteure que de croire que le point final ne cache pas des points de suspension ! Il reste toujours un détail qui réclame une suite, une autre aventure d’Arialde.
La Planète du mensonge, cependant, a la fin la plus « finale » de toute la série. Si l’auteure n’écrit pas un sixième titre, les lecteurs qui se passionnent pour les enquêtes d’Arialde seront probablement déçus, mais ils ne lui en voudront pas. La suite de la vie de la jeune femme, on peut l’imaginer assez bien tout seul : elle semble enfin devoir être heureuse avec Jérémie… Et après cette aventure, on devine que sa vie d’adolescente est bel et bien terminée. J’ai relu des passages de Mort sur le Redan (le premier livre de la série) pour comparer la nouvelle Arialde avec celle du début. L’évolution du personnage, amorcée dès La Saison de l’exil, est encore plus frappante dans ce dernier roman – et ce, même si la jeune Arkadienne a toujours été bien mûre pour son âge. La suite, si suite il y avait, ne serait donc peut-être pas un roman jeunesse.
J’aurais pourtant envie de dire : « Oui, mais ces Cristobaliens qui se sont enfuis, sans rendre de comptes à qui que ce soit… ? » Francine Pelletier a piqué ma curiosité au sujet de ces extraterrestres qui s’expriment par sifflements, va-t-elle nous en reparler dans un prochain roman ? Je l’espère…
Julie MARTEL