Anne Legault, Récits de Médilhault (SF)
Anne Legault
Récits de Médilhault
Québec, de l’Instant même, 1994, 157 p.
On peut le dire, l’imaginaire d’Anne Legault ne laisse pas le lecteur indifférent. Elle brosse autour du décor médiévo-futuriste de la ville de Médilhault un tableau étonnant de la société de nos petits-enfants. Il s’agit principalement d’une société qui aura connu une régression face à celle de notre époque : l’obscurantisme si caractéristique du Moyen Âge n’est pas très loin de ce monde primitif, dur et cru où nos acquis sont désormais considérés comme folkloriques, exotiques ou faisant partie du patrimoine. L’ignorance est un thème fort de la plupart des nouvelles du recueil et l’on ne s’étonnera pas de constater que l’histoire se répète, cyclique de façon quasiment immuable. Serions-nous les nouveaux Romains décadents sur le point d’être bafoués par les hordes barbares venus d’on ne sait où ?
D’une nouvelle à l’autre, de multiples liens sont tissés, tantôt unissant les personnages, tantôt faisant se chevaucher les intrigues ; cela permet à l’auteure d’arriver à d’intéressants résultats sur le plan de la trame narrative. De manière récurrente, on y parle de littérature, de livres qui sont devenus une menace pour les hommes, de Chaplin et de ses films, de Montréal, un Montréal que l’on sent réel, vrai, le Montréal des jeunes, le Montréal fou du Plateau Mont-Royal. Mais dans Récits de Médilhault, on retrouve surtout l’ombre de la mort, parfois barbare, cruelle, mais le plus souvent bienvenue.
Donc, un recueil dur, noir et pessimiste. Peut-être est-ce en raison du contexte où je l’ai lu (la morosité des froides soirées montréalaises de février), mais il s’agit en somme de plusieurs bonnes petites nouvelles qui m’ont presque toutes plu.
Simon DUPUIS