Frédérick Durand, À l’intention des ombres (Fa)
Frédérick Durand
À l’intention des ombres
Gatineau, Vents d’Ouest (Rafales), 2008, 212 p.
Frédérick Durand est un auteur prolifique. Il compte à son actif depuis 1992 de nombreuses publications : romans fantastiques, romans historiques, romans jeunesse, nouvelles, novella, poésie. En relisant les critiques que j’avais faites de Au rendez-vous des courtisans glacés (Solaris 152) et L’Île des cigognes fanées (Solaris 153), tous deux publiés à La Veuve Noire, je m’aperçois que je leur avais trouvé beaucoup de défauts : traitement des personnages, trop nombreux et sans épaisseur ; structure décousue ; flou « artistique » agaçant ; un amour trop grand du gore dégoulinant, etc.
Je me suis donc réessayée, et le résultat est probant : je préfère de loin ses nouvelles. À l’intention des ombres est un recueil de vingt-cinq nouvelles, dont huit avaient déjà été publiées en revue (six dans Solaris). Passant de l’horreur gore la plus angoissante au fantastique plus léger mais non moins cynique, les nouvelles s’enchaînent, provoquant dans leur sillage un frisson qui ne s’arrête qu’à la dernière page : vengeance, destin, résilience impossible, légendes urbaines, angoisse, absurdité, cruauté et folie se côtoient, non sans une pointe d’humour toujours présente. La longueur des nouvelles (vingt pages maximum) permet de plonger assez profondément dans la noirceur et le désespoir, sans pour autant en avoir la « nausée », souvent présente lorsque les mêmes thèmes sont utilisés en roman. Je ne détaillerai pas les nouvelles une par une, il y en a trop, et certaines ne peuvent pas être résumées sans gâcher le plaisir de lecture.
Ce qu’il y a à retenir est que l’auteur évolue avec aisance dans la forme courte, et que je n’y retrouve pas les « erreurs » que je lui avais reprochées dans les deux romans que j’avais lus : il est efficace, structuré, nuancé, les personnages sont présents et bien dessinés, et les finales frappent comme une claque. Doit-on en conclure que l’auteur est meilleur dans les nouvelles – qui ne lui laissent pas l’occasion de s’éparpiller et de se perdre – que dans les romans ? C’est peut-être un peu résumé, il me faudrait avoir lu plus de ses publications. J’aurai probablement l’occasion de le lire encore bientôt, car l’auteur annonce sur son blogue un roman à paraître chez Vents d’Ouest, et un probable roman à l’automne chez un autre éditeur, encore non connu.
Si vous voulez découvrir Frédérick Durand, vous initier à ses univers sombres et désespérés, commencez sans hésiter par À l’intention des ombres, un concentré brut de son talent d’écrivain.
Pascale RAUD