Corinne De Vailly, Notes de sang (SF)
Corinne De Vailly
Notes de sang
Montréal, Recto Verso, 2015, 304 pages
Avec plus de soixante romans à son actif, je n’ai d’autres choix que de qualifier Corinne De Vailly d’auteure prolifique. J’en profite même pour ajouter : touche-à-tout. Depuis 1986, elle ne se cantonne pas dans un seul genre ni un seul public. De fait, après ses séries jeunesses, elle s’est adressée aux adolescents sans toutefois négliger un lectorat résolument adulte. Ses histoires abordent des thématiques aussi variées que les genres dans lesquels elle écrit : science-fiction, polar, fantastique, drame, aventure… et du steampunk pour le cas du roman sur lequel j’attire présentement votre attention : Notes de sang.
Voici un résumé succinct : en cette grise journée de 1850, il n’y a pas que la pluie qui attriste la ville de Londres. La communauté des Fils du vent se recueille autour de la tombe du célèbre violoniste tsigane Yoshka Sinti. Sur leurs propres violons, ils improvisent un hommage à leur défunt maître. Hawthorne Lambton, horloger mais surtout chef d’une organisation criminelle, la Confrérie des Freux, convoite le violon de Sinti pour ses pouvoirs : ceux-ci pourraient guérir son fils mourant et annuler la malédiction qui afflige sa famille depuis plusieurs siècles. Foster Riley, que l’on nomme l’Assommeur de la Confrérie des Freux, sera chargé par Lambton de retrouver cet instrument récemment disparu. Mais Riley convoite secrètement d’autres intérêts…
Parce qu’il s’agissait de ma première incursion dans l’imaginaire de Corinne De Vailly, je ne savais pas du tout à quoi m’attendre. Comme pour chaque auteur que je découvre depuis que je sais lire, j’espérais être agréablement surpris par ma lecture.
Après coup, est-ce le cas ?
Affirmatif.
Notons d’abord que la couverture est impressionnante : en un seul regard, le lecteur sait quel genre de livre il tient entre ses mains : du steampunk. Les teintes sombres de l’illustration reflètent très bien l’atmosphère glauque dans laquelle baigne l’intrigue ainsi que ses nombreuses sous-intrigues.
De Vailly réussit haut la main à recréer à sa manière le steampunk, genre qui, avouons-le, se fait plutôt rare au Québec par les temps qui courent. Ses descriptions précises des lieux et des ambiances ainsi que son style fluide invitent le lecteur à découvrir cet univers bien particulier dans lequel technologie et magie s’entremêlent. On sent bien la vapeur qui s’échappe des machines dans ce Londres du XIXe siècle.
Ce roman fourmille d’idées intéressantes et intégrées de façon ingénieuses à la trame narrative. Par exemple, le violon, cœur même du roman, aurait été, selon une légende tsigane, fabriqué à partir d’os humains et serait, raconte-t-on, l’instrument du diable lui-même…
Les personnages, quant à eux, me semblent bien cernés (surtout Hawthorne Lambton dont les actes se divisent en deux axes bien précis : son côté paternel, émotif, qui ferait tout pour sauver son fils unique et son côté rationnel, le scientifique en lui, qui désire plus de pouvoir via le violon magique), loin des simples archétypes dont nous gave habituellement la littérature populaire. Au fil des pages, on passe de l’un à l’autre personnage, ce qui permet au lecteur de diversifier les regards qu’il pose sur le monde imaginaire et d’aborder l’intrigue selon de multiples points de vue.
Je recommande donc sans hésitation Notes de sang à ceux et celles qui voudraient découvrir ou redécouvrir ce genre (encore) rare au Québec : le steampunk.
Une musique bien orchestrée qui ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd, comme on dit…
Jonathan REYNOLDS