Marie Bilodeau, Le Sang de Mirial (SF)
Marie Bilodeau
Le Sang de Mirial
Lévis, Alire (GF), 2016, 496 p.
Les jumelles Layela et Yoma Delamores ont grandi dans la rue, à la dure, survivant grâce à leurs talents de cambrioleuses, à leurs mystérieuses visions du futur et à leur alliée, la Berganda Josmère. Peu à peu, elles ont économisé suffisamment d’argent pour s’offrir une vie rangée. Les voilà séparées de la Berganda et reconverties en fleuristes. Cependant, le matin de l’ouverture de leur boutique, Yoma disparaît et Josmère fait un retour dans la vie de Layela. Celle-ci refuse de croire que la simultanéité des événements est un simple hasard. Yoma et Josmère ont l’habitude de se relayer pour la protéger. Mais cette fois, Layela est persuadée que c’est Yoma qui a besoin de protection, car une vision funeste hante les abords de sa mémoire. Elle se lance donc à sa recherche.
De leur côté, Ardin et Avienne Malavant n’ont jamais connu d’autre foyer que la Destinée, un vaisseau de contrebandiers dont leur défunt père fut le capitaine. Toutefois, la situation économique de l’équipage qui leur tient lieu de famille est précaire. Si fragile, en fait, que les contrebandiers sont forcés d’accepter une mission qui va à l’encontre de leurs principes moraux : enlever une jeune femme et l’escorter jusqu’à la mythique planète Mirial.
La jeune femme s’avère être Layela Delamores. Et son retour sur Mirial est nécessaire pour sauver l’étoile éponyme. De l’étoile Mirial dépend le renouvellement de l’éther, une énergie mystique qui confère aux Berganda et à d’autres races des pouvoirs quasi-magiques. L’empire Solarien, qui domine les systèmes connus, ne voit pas d’un bon œil la renaissance de ces pouvoirs, qui signifierait le retour en force de races non humaines pratiquement éteintes.
En chemin vers Mirial, tandis qu’Ardin et Avienne découvrent qu’ils sont eux-mêmes originaires de Mirial et que des vaisseaux Solarien les prennent en chasse, Layela et Yoma se livrent à un chassé-croisé avec la mort et échangent fréquemment leurs places, l’une accompagnant docilement un équipage Mirialais ou des militaires Solariens, alors que l’autre tente de la secourir. Car les jumelles ont une certitude : elles fouleront toutes deux le sol de la planète Mirial, mais une seule y survivra…
L’auteure Marie Bilodeau est montréalaise d’origine, mais ontarienne d’adoption. Elle écrit et conte en anglais. Après avoir touché à la fantasy et à l’horreur, elle a rédigé une trilogie de space opera, dont Le Sang de Mirial est le premier volume. La série lui a valu deux nominations aux prix Aurora et un prix de science-fiction. Les éditions Alire ont retenu les services d’Élisabeth Vonarburg afin de traduire cette œuvre et de l’offrir au public francophone.
Je parie que le cadeau sera fort apprécié des lecteurs qui s’ennuient des space opera classiques à la Jack Vance ou qui découvrent le genre pour la première fois ! Avec son abondance de personnages féminins de premier plan, son rythme effréné, ses descriptions techniques courtes et claires, ainsi que ses images fortes (les spectres qui peuplent Mirial vont habiter longtemps mon imaginaire), le roman modernise les conventions et se lit sans effort.
Par contre, les habitués de la maison d’édition Alire pourraient être déçus par la lecture de Le Sang de Mirial. La structure narrative de ce roman n’est pas aussi soignée que celle des autres œuvres de science-fiction publiée à la même enseigne. Tout le passé des jumelles nous est raconté sans jamais nous être montré, plusieurs informations nous sont balancées avec un brin de retard, comme à la suite d’une arrière-pensée, et les personnages acceptent beaucoup trop facilement des révélations qui bouleversent leur univers. De plus, on devine, derrière la traduction, que l’auteure a un style très lourd. Le passage de l’anglais au français, malgré la virtuosité bien connu de la traductrice, n’a pas amélioré les choses, alors quelques phrases, ici et là, demandent une relecture attentive.
Cela dit, ces détails ne devraient pas suffire à gâcher le plaisir des lecteurs friands de space opera et je crois qu’en refermant le roman ils seront, tout comme moi, curieux de connaître la suite des aventures des Mirialais. Surtout que la mort en fauche quelques-uns en cours de route et on se demande si… oh, je ne vous en dis pas plus !
Geneviève BLOUIN