Mélanie Launay, 669 Peony Street (Fa)
Mélanie Launay
669 Peony Street
Neuilly-sur-Seine, Michel Lafon (Roman), 2022, 240 p.
Le roman s’ouvre alors que Simeon Lake, plus loin surnommé Mr. Cat ou L’Étranger, monte à bord d’un train quittant Sleepy Hawthorn pour se rendre au 669 Peony Street, où il doit retrouver une femme mystérieuse qui exerce sur lui une attirance particulière. Le récit fait apparaître de nombreux personnages qui se meuvent dans le même train, avant d’effectuer un bond en arrière dans le temps permettant au lecteur d’en apprendre davantage sur chacun d’entre eux. L’histoire se poursuit, entremêlant quelques chapitres de la trame du présent et des analepses qui donnent bien vite un ton au roman.
Peu à peu, le lecteur découvre l’ensemble des citoyens de cette ville d’Angleterre. Par le passé, entre autres, Simeon Lake et le Docteur Breathman se sont querellés à propos de cette mystérieuse femme mentionnée précédemment. Ce conflit a donné naissance à une foule de commérages à propos de cette curieuse Miss D., qui se fait aussi appeler Peony (entre autres !). Si Mr. Cat en est fasciné, Mr. Shush voit le mal en elle. Plus tard, en raison d’une confusion, une erreur se produit dans la livraison de deux carnets du Docteur Breathman dont les destinataires sont intervertis. Or, l’un de ces carnets contient des notes concernant des recherches importantes et deviendra l’objet d’une quête pour certains personnages, qui désirent à tout prix mettre la main dessus. En somme, 669 Peony Street raconte l’histoire d’une petite ville, d’une femme mystérieuse et d’un carnet précieux qui se promène de mains en mains, convoité par des gens aux intentions diverses.
Dans cet univers particulier d’époque victorienne, le lecteur a toutefois le grand plaisir de rencontrer des personnages très intéressants. Si le récit se déroule dans une époque appartenant au passé, il met néanmoins de l’avant certains protagonistes forts, dont les croyances, le caractère et l’orientation sexuelle, entre autres, sont plus « modernes ».
669 Peony Street se lit comme on tente de résoudre un casse-tête. Chaque chapitre apporte un nouvel élément à l’histoire, se concentrant sur un ensemble de personnages, dépeignant un moment du passé, les actions des habitants de Sleepy Hawthorn et leurs opinions sur leur voisinage et sur la mystérieuse Miss D. Chaque personnage a aussi la particularité d’hériter, en plus de son nom, d’un surnom amusant donné par Scarlett Hope, celle qui se fait appeler Petite Miss. Si le lecteur, après avoir aperçu la couverture du roman, croit avoir affaire à une lecture simple et légère, il sera déçu, puisqu’il devra se démêler entre les habitants de la petite ville tout en se mesurant à quelques autres défis, néanmoins plus plaisants.
La trame narrative du récit, en effet, présente une construction singulière. La trame temporelle qui se déroule au présent, soit celle où Simeon Lake prend le train vers le 669 Peony Street, est entrecoupée de plusieurs analepses abordant des temporalités différentes de l’histoire des gens de Sleepy Hawthorn. Les retours en arrière varient de quelques années à plus de dix ans afin de découvrir les relations qui relient chaque protagoniste, mais aussi tout le chemin parcouru par cet intrigant carnet de notes, semble-t-il, plein de secrets. L’ultime quête du lecteur : comprendre qui est cette fameuse Miss D. dont tous les habitants de la ville parlent et quel est son rôle.
Le lecteur verra finalement toutes les trames narratives se rejoindre en une seule, qui lui permettra de lever le voile sur une grande part des derniers mystères du roman. Une grande part mais non l’entièreté, puisque la conclusion reste énigmatique et requiert une interprétation non négligeable. 669 Peony Street demande un certain effort pour bien le déchiffrer, mais se laisse apprécier en raison des idées modernes qu’il met de l’avant. Une lecture un peu ardue qui, néanmoins, divertit.
Émanuelle PELLETIER-GUAY