Louis-Philippe Michaud, La Nouvelle Magie (Le Premier Wykan -1) (Fy)
Louis-Philippe Michaud
La Nouvelle Magie (Le Premier Wykan -1)
Montréal, Druide (Reliefs), 2021, 310 p.
Et si la magie avait toujours existé et qu’elle était maintenant vouée à disparaître ? C’est sur cette hypothèse que s’est appuyé Louis-Philippe Michaud pour rédiger La Nouvelle Magie, premier tome de la série Le Premier Wykan. Dans ce roman, on suit Victor Lévesque, qui cherche à établir une rencontre avec un spectre nommé Adélaïde pour convaincre les dirigeants de l’Organisme, une secte de collectionneurs d’artefacts magiques, de mettre en œuvre le projet de sa marraine Marguerite : développer une nouvelle magie à partir de l’ancienne. Le hic : trouver une personne prête à faire office de cobaye dans cette étude hautement dangereuse. Victor réussira-t-il à persuader sa marraine qu’il est la personne toute indiquée pour occuper ce rôle ?
Disons-le d’emblée, ce roman foisonne d’idées. Du concept de la magie ancestrale qui disparaît de plus en plus rapidement à celui d’une nouvelle magie inspirée de la science, le lecteur est transporté d’une péripétie à l’autre à un rythme enlevant. C’est d’ailleurs l’une des forces de ce livre : les pages se dévorent à la vitesse grand V. Les amateurs d’action seront servis avec cette lecture divertissante qui accorde également une importance considérable aux personnages. Même si les protagonistes et antagonistes sont bien typés, ils ne sont pas pour autant manichéens. On notera tout particulièrement la relation entre Victor et Marguerite : basée sur un profond respect mutuel, elle se développe davantage au fur et à mesure du roman. Quant au style, bien qu’agrémenté de quelques effets somme toute réussis, il mise d’abord et avant tout sur la simplicité, ce qui en renforce l’efficacité.
Cependant, malgré les nombreux points positifs mentionnés ci-haut, je ne puis affirmer avoir apprécié ma lecture tant certains éléments m’ont fait tiquer, à commencer par les nombreuses erreurs qui ont échappé à la révision. On bute régulièrement sur certaines phrases durant notre lecture. Le roman contient d’ailleurs une surutilisation de la périphrase qui, bien souvent, alourdit le texte (« Les petites billes sans âme qui servaient d’yeux au conspirateur s’écarquillèrent, ses sourcils bondirent vers le haut, ses joues prirent un teint de crème périmé [sic] », p. 275). Sur un autre plan, la première partie du roman souffre d’une écriture se voulant trop explicative : l’univers créé par Michaud est vaste, et il peut être difficile de bien le comprendre au départ sans les renseignements fournis par Adélaïde durant près de cinquante pages, je le conçois. Mais en l’état, la discussion entre Victor et elle apparaît plaquée, d’autant plus que ces renseignements ne semblent pas avoir une très grande incidence sur le développement de la nouvelle magie autre que de convaincre l’Organisme du bien-fondé des recherches de Marguerite. Ce qui m’amène à un autre élément problématique : les deux parties que constituent ce roman s’arriment plus ou moins bien entre elles. On a de la difficulté à comprendre ce qui relie la magie ancestrale au projet de Marguerite, car les explications pseudoscientifiques s’avèrent plutôt floues. Espérons que l’auteur développera davantage ce lien dans le prochain roman de la série. L’arrière-monde, pour sa part, manque un peu d’homogénéité (on y retrouve même des orques semblables à ceux de Tolkien).
Oublions un instant les bémols énoncés précédemment : l’univers de Louis-Philippe Michaud a, somme toute, du potentiel. Pour un premier roman, il se révèle globalement réussi, en particulier sur le plan du divertissement qu’il procure. Je crois cependant qu’il ne s’adresse pas à tous les publics. Pour qui fait ses premières armes dans la science fantasy, cette lecture est toute indiquée ; pour les connaisseurs du genre, je doute qu’ils retirent quelque chose de cette série pour l’instant.
Mathieu ARÈS