Claude Daigneault, Noëls, autos et cantiques (Fa)
Claude Daigneault
Noëls, autos et cantiques
Montréal, Logiques, 1995, 179 p.
Mettons les choses au clair tout de suite. Je suis une fanatique de Noël sous toutes ses coutures et il aurait fallu que ce recueil de contes soit bien mauvais pour que je ne le lise pas d’un bout à l’autre ! J’ai bien fait de l’intercepter avant que mon goujat de mari ne l’expédie à quelqu’un d’autre pour le critiquer…
À la lecture de Noël, autos et cantiques, un mot m’est venu à l’esprit : charmant. Souvent drôle, parfois hilarant, quelque fois triste, mais le plus souvent charmant. Comme Noël, en fait, et tant pis pour les Scrooge qui me lisent.
Plusieurs des contes n’ont pas d’éléments fantastiques et, soit dit en passant, ce sont les plus drôles et de loin. « La Scala Sancta » m’a fait pleurer littéralement de rire. Par contre, les premiers contes fantastiques m’ont laissée sur ma faim. « La Samaritaine », une classique histoire de fantôme, ne respecte pas à mon sens les lois du genre, avec une fin qui rate son effet en voulant innover. La description des personnages et l’atmosphère y est pourtant très intéressante. « En face du magasin », le deuxième conte fantastique du recueil, commence avec une superbe description d’un Noël sordide avec une famille éclatée, et enchaîne avec une description des effets de l’alcool sur un cerveau déprimé qui m’encourage dans ma décision de rester abstinente (eh oui !). Là où ça se gâte, c’est quand l’auteur fait intervenir une multitude de personnages surgis du cinéma classique. Je suis bien d’accord pour la scène obligatoire de rédemption du (ou de la) désespéré(e), mais pas dans la confusion la plus totale.
La même technique réussira beaucoup mieux dans « Un 24 décembre à la Dickens… » où il emploie les films-icônes de Noël et leurs personnages pour décrasser un Scrooge moderne guetté par la crise de foie. Là, on embarque, surtout ceux qui ont vu les films en question 25 fois ! Si l’auteur avait pu nous éviter la présence de Marilyn Monroe, c’eut été parfait. Est-ce qu’on ne pourrait pas se le dire une fois toute, en littérature générale comme en fantastique : Marilyn, Charlot, Bogart et James Dîîîne, pas avant un autre trente ans, par pitié ! On n’en veut plus, on les vomit !
Bon, c’est fait pour les vieux comptes à rendre, passons à l’ange sur la pointe de l’arbre. Mon conte favori dans ce recueil est la superbe « Graffiti Girl », où j’ai cru reconnaître une bonne centaine de mes patientes adolescentes rencontrées dans le cadre de ma pratique médicale (il paraît que j’ai le tour avec elles, alors les autres médecins me les refilent, surtout les révoltées, grunge, punks et autres « pas examinables »). Dans « Graffiti Girl », l’atmosphère passe du plus noir au plus charmant (encore), les personnages sont très crédibles, attachants, et la toute petite touche de fantastique de la fin provoque le même « Aaah ! » de contentement que lorsque le sapin de Noël terminé est finalement allumé au crépuscule du 24 décembre à Gallix, Côte-Nord.
Sur ce, je vous laisse en recommandant Noël, autos et cantiques, devant le poêle à bois, deux bons chiens à vos pieds et une bière sans alcool à la main. Joyeux Noël !
Valérie BÉDARD