Roger Mondoloni, L’Aube du temps qui vient
Roger Mondoloni
L’Aube du temps qui vient
Montréal, Pierre Tisseyre, 1989, 306 p.
Une curiosité que ce long roman, dont on ne sait trop s’il s’agit d’un canular dénué d’humour ou au contraire d’un sincère exposé de la conception des rapports interpersonnels et de la place occupée par la foi dans le cadre de ceux-ci, que partage l’auteur. Toujours est-il qu’après 306 longues pages, Roger Mondoloni finit par nous convaincre qu’il est ici tout à fait sérieux et, si malgré tout le doute persiste quant à ses intentions, ce n’est dû qu’à l’étrange sentiment de confusion qui se dégage de ce livre inclassable.
Oscillant sans cesse entre une intéressante réflexion religieuse et la répétition assommante de clichés vaguement métaphysiques, l’auteur sape les fondements de son entreprise alors même qu’il demande au lecteur d’y croire. Ainsi, en ce qui me concerne, l’emploi excessif de majuscules (« Il », « Lui », « le Créateur », etc.) pour souligner les aspects divins ou surnaturels de l’histoire, de même que le recours fréquent à des formules accrocheuses mais vides de sens telle « le plus vient du moins », pour ne citer que la plus agaçante parmi plusieurs du même genre, sont autant d’éléments qui à la longue alourdissent inutilement et fatalement un récit pourtant tout simple.
La trame narrative est d’ailleurs plutôt intéressante ; le problème majeur se situe dans le ton adopté par l’auteur. Parfois, on jurerait qu’il est sur le point de nous révéler le secret de l’Atlantide ou de nous raconter ses voyages avec les extraterrestres du Pérou, et les nombreuses citations de la Bible intégrées ci et là au texte n’aident en rien à dissiper cette malheureuse impression qui se dégage de pages de plus en plus lourdes à tourner. Didactiques à outrance, ces passages confèrent au livre une allure pamphlétaire qui fait penser aux documents distribués par différents cultes religieux, ayant tous fait l’expérience d’une « révélation » plus ou moins farfelue, qu’ils se sentent obligés de nous communiquer.
En définitive, l’échec relatif de L’Aube du temps qui vient a davantage trait à la forme qu’au fond ; son apparente profondeur ne fait que rendre plus désolante l’absence presque totale de véritable substance. Malgré tout, je n’ai pas détesté lire ce roman car, par moments, l’auteur réussit à évoquer une scène particulièrement saisissante, qui reste en mémoire même après qu’on a fermé le livre. Les défauts qui affligent ce roman sont ceux que l’on retrouve fréquemment dans les récits « à message », alors que leurs auteurs ne parviennent pas à équilibrer les aspects fiction et documentaire de leurs textes. En somme, un roman dont je ne peux conseiller vraiment la lecture, malgré cette impression indéfinissable, presque magique, qui se dégage des dernières pages. Mais c’est un peu trop tard et cela ne parvient pas à faire oublier les nombreuses longueurs des 300 pages précédentes.
Jean-Philippe GERVAIS