I’ll Meet You Yesterday, de Tom Barlow (SF)
Tom Barlow
I’ll Meet You Yesterday
Ottawa, Bundoran Press, 2013, 284 p.
L’Amérique du milieu du siècle ne vit pas des heures très réjouissantes. La misère, les changements climatiques et les riches Chinois règnent en maîtres sur le territoire de l’ancienne superpuissance. Cotton est une ex-junkie qui se croit soupçonnée par ses anciens fournisseurs de les avoir dénoncés à la police. Deuce est un ancien parfumeur qui a dû fermer boutique et dont la femme a disparu depuis quelques années. Quand Cotton fuit la clinique de désintoxication où elle avait repris goût à la vie, elle se réfugie dans une pension qui héberge aussi Deuce.
Malgré tout, Cotton résiste à l’attrait de la drogue baptisée « jamais vu », qui permet de revivre des souvenirs comme si c’était la première fois tout en éprouvant simultanément un plaisir orgasmique. Le titre qui fait allusion à cette drogue qui replonge dans le passé est en soi symbolique du passéisme de l’ouvrage. Si le « jamais vu » sert à justifier quelques retours en arrière, le lecteur aurait tort de s’attendre à des exploitations dickiennes qui brouilleraient la distinction entre le présent et le passé. Barlow s’en tient à la construction d’une intrigue policière qui démarre lorsque Cotton accepte un contrat qui l’expédie à l’autre bout des États-Unis, où elle subit à son corps défendant une opération chirurgicale qui fait d’elle une mule lestée d’un plein chargement de « jamais vu ». Elle prend la fuite en compagnie de Deuce, mais elle devra affronter les pires cauchemars du présent et de son passé occulté avant d’échapper à ses ennemis.
Barlow, né en 1950, est un auteur de la vieille école et ses héros se montrent entreprenants ou débrouillards même quand ils se débattent dans les pires difficultés. En prenant pour décor une Amérique accablée par une longue dépression qui n’arrête pas de finir, il imagine une société proche de celle des années 1930. L’extrapolation est si modeste qu’elle en devient exotique, mais le suspense y gagne parce que les péripéties restent familières. Les amateurs de romans d’action à échelle humaine apprécieront la mise en scène des personnages principaux, qui se méritent la sympathie du lecteur, liquident les passifs de leurs anciennes vies et peuvent enfin tomber amoureux l’un de l’autre.
Jean-Louis TRUDEL